Bertrand, Didier2023-10-262023-10-262022-12Bertrand, D. (2022). Usufruit by Nicolas Combet (review). The French Review, 96(2), 213–213. https://doi.org/10.1353/tfr.2022.0265https://hdl.handle.net/1805/36728La notion juridique d’usufruit, spécifique au droit français, consiste dans le fait de jouir d’un bien—souvent une maison ou un bâtiment—sans en être propriétaire, à condition de l’entretenir. Dans son roman éponyme, Nicolas Combet raconte la vie d’un petit monde qui se côtoie à Montreuil, dans la banlieue est de Paris. À la manière de Balzac qui dans La duchesse de Langeais entame son récit sur une description détaillée d’Angoulême avant d’entrer dans le vif du sujet, Combet ouvre son premier roman sur un recul à la fois historique et géographique: une histoire de la ville de ses origines jusqu’à nos jours. Il décrit en détail la banlieue est de Paris, pour ensuite se focaliser sur Montreuil, et enfin, sur le quartier où la majeure partie du récit se déroule. On y trouve une petite maison, un atelier d’ébénisterie, un immeuble aux apparences modestes, et la cour qui relie les habitants. De fait, il existe à Montreuil bon nombre de bâtiments laissés à l’abandon à cause de problèmes d’héritages contestés ou inconnus—les propriétaires sont morts, les héritiers se poursuivent mutuellement en justice ou ne savent pas que ces propriétés leur reviennent de droit. Ils sont squattés par un monde interlope de sans-papiers et d’immigrants illégaux. Le roman se construit donc sur les tensions qui existent entre les habitants “de souche” et les nouveaux arrivants. C’est dans ce cadre qu’évoluent les personnages, des gens humbles et ordinaires qui demeureraient sans nom si la loupe romanesque ne leur avait pas octroyé un statut hors du commun. Il s’agit de Paul, le personnage principal, jeune d’abord, mais que le fil du récit suit jusque dans sa vieillesse; Renée, la doyenne du groupe, dont on apprend qu’elle est née garçon, mais “re-née” au sexe de son choix; les Dominique, un couple hétérosexuel qui partage leur nom unisexe et une paranoïa qui les maintient enfermés dans leur appartement; et enfin, Adama, l’Africain squatteur, qui veille de façon bienveillante sur tout ce petit monde. Renée, à la fois amie et propriétaire de Paul, lègue l’immeuble et la maison voisine à ce dernier qui n’aurait peut-être jamais dû habiter dans ce quartier. Paul, vieillissant, ne sait trop que faire de cet héritage qui lui pèse. Petit à petit, tous ces personnages disparaissent, laissant Paul seul avec un chien et un chat qu’il n’ose pas nommer. Enfermé dans sa solitude, Paul ne se rend pas compte qu’Adama s’installe dans sa maison, et y invite d’autres infortunés de son calibre. Ce roman s’avère à la fois touchant et étrange par son manque de linéarité: on y lit de l’histoire (un chapitre sur le Moyen Âge au milieu du livre) et de la géographie (un excursus sur Madagascar), qui donnent l’impression que le présent n’existe qu’à peine, et qu’il importe de le placer dans le contexte d’un temps et d’un lieu beaucoup plus vastes.frPublisher PolicyusufructFrench lawNicolas Combetinhabitant tensionsromantic lensUsufruit by Nicolas Combet (review)Article